Les lois de la conduite

Vous avez de la chance, je suis dans une phase créative et j'ai donc plein de choses à raconter!
Pour commencer, j'avais envie de parler un peu de la conduite... Bien sûr j'en ai déjà parlé mais peut-on vraiment imaginer ce qu'est la circulation à Hanoi si on ne l'a pas vécu?
Déjà, je peux vous dire qu'en 9 mois, la circulation a clairement augmenté... Maintenant, il est difficile, en journée, de trouver un moment où les rues sont désertes... Plus de motos, plus de voitures, pas plus d'espace = plus d'embouteillages! Et les embouteillages, comme vous le savez sans doute, c'est loin d'être drôle... Je vous assure qu'il y a de quoi devenir complètement fou.
Les vietnamiens semblent n'avoir aucune conscience des effets collectifs de certains comportements en moto. Je m'explique: imaginez une rue, large, à double sens, assez bondée mais ça circule. Voilà qu'un minibus arrivant d'une ruelle à ma droite veut tourner à gauche. Autrement dit, il doit traverser ma voie pour se rendre sur celle de gauche et s'insérer. Oui mais voilà, personne ne semble prendre conscience que laisser passer le bus simplifierait sérieusement les choses et les motos continuent à s'infiltrer, devant, derrière, partout, personne ne s'arrête à moins d'y être réellement forcé. Le bus avance centimètre par centimètre et fini par être au beau milieu de la voie mais les motos continuent à passer. Comme le bus gène, ils se déportent sur les côtés: sur la voie de gauche et sur le trottoir. Au bout de quelques minutes, la voie de gauche se réduit à la largeur d'une moto devant le bus et est donc totalement bloquée. à droite, on arrive encore à se faufiler derrière le bus mais de l'autre côté c'est une autre histoire! Ceux qui arrivent en face, se sont eux aussi déportés sur les côtés pour continuer à avancer, je me retrouve donc à devoir monter sur le trottoir de droite pour avancer... Ce jour là, j'étais furieuse... Quelle galère! mais le problème est que ce genre de choses arrive tout le temps, dés que ça n'avance plus, les gens refusent de s'entasser derrière pour attendre et persiste à se déporter tant qu'il y a de la place sur le côté, réduisant ainsi peu à peu l'autre voie qui se bouche à son tour. A la fin, on se retrouve avec deux front de motos qui se font face et plus personne ne bouge!
J'ai essayé de comprendre ce comportement en en discutant avec une collègue. Je lui ai demandé pourquoi les gens n'attendait pas sagement que ça puisse se débloquer au lieu de bloquer plus. Je lui ai expliquer exactement la situation que je viens de vous décrire et voilà ce qu'elle m'a répondu: mais tu sais, tout le monde est pressé de rentrer chez lui alors il veut passer devant tout le monde et pas attendre. Certes, mais si tout le monde attend 5 minutes, tout le monde rentrera plus vite... Elle n'a pas réussi à comprendre cette logique là.

Evidemment, ce n'est qu'un des innombrables comportements illogiques de la conduite vietnamienne. Mais je crois que je commence à comprendre. En Europe, nous conduisons des véhicules de toutes sortes depuis des siècles, nous avons appris, à force d'habitude que la logique de la route dépend du comportement collectif et pas uniquement du comportement individuel. Enfin disons que la plupart d'entre nous ont compris parce qu'il y a toujours des abrutis pour se croire prioritaires et doubler n'importe comment... Ici, la conduite est quelque chose de relativement récent, les gens circulaient à pied ou à vélo avant et il n'y avait jamais d'embouteillages. La logique de la route reste donc une logique très individuelle: je passe, j'évite les obstacles qui se dressent devant moi, sans anticiper les conséquences que mon comportement, conjugué à celui des autres pourra faire. Et c'est un cercle vicieux. J'ai parfois essayé de rester sur place et d'attendre pour laisser la situation se débloquer... Mais c'est impossible car les 50cm qui se sont dégagés devant ma moto sont très vite envahis par un autre véhicule qui a trouvé l'opportunité d'avancer de 50cm! Du coup, on fait comme tout le monde, on occupe tout l'espace libre. Enfin je fais quand même attention à rester sur ma voie! Et quand j'arrive en face,  je roule le plus  à gauche possible sur ma voie (c'est à dire souvent le long du trottoir de droite!), au ralenti et à grand coup  de klaxonne pour forcer la file d'en face à se tasser un peu... C'est ma foi tout ce que je peux faire, et tant pis si les vietnamiens me prennent pour une folle!